Points clefs :
- Le microbiote intestinal est responsable d’un ensemble de processus dans notre organisme comme l’absorption des nutriments.
- Avec l’âge sa composition change et est associée à des pathologies comme la maladie d’Alzheimer ou l’arthrose.
- Le maintien de l’équilibre de la flore intestinale à l’aide de médicaments ou de mesures diététiques peut contribuer à freiner le vieillissement.
Le microbiote est un ensemble de micro-organismes (bactéries, virus, champignons non pathogènes, etc…). Le corps en possède plusieurs, localisés par exemple au niveau de la peau ou de la bouche. Depuis plusieurs années, la recherche s’intéresse tout particulièrement au microbiote intestinal qui est le plus important dans notre corps en termes de poids, 2 kg en moyenne, et d’effets sur l’organisme1. Les progrès des techniques d’analyses de l’ADN ont permis de mieux connaitre les espèces bactériennes colonisant nos intestins et de comprendre leur rôle sur notre santé1. Bienvenue de l’autre côté du microscope pour découvrir les richesses du microbiote intestinal.
Des bactéries et des hommes
La surface de l’intestin humain mesure environ 400 m2 et est tapissée par les bactéries du microbiote2,3. Ces bactéries sont dites commensales c’est-à-dire qu’elles utilisent notre organisme pour leur propre bénéfice sans nous causer de dommages. Le microbiote est dynamique et évolue selon l’alimentation, les changements de l’environnement (drogue, alcool, antibiotique…) et l’âge de son hôte3. En fonction des situations, il peut peser entre 1 et 5 kg2.
Le microbiote possède plusieurs rôles, comme celui de moduler l’absorption des nutriments ou de participer à la défense de l’organisme contre des pathogènes. La recherche commence à découvrir ses impacts bénéfiques mais aussi négatifs sur l’organisme3.
Tout est question d’équilibre3
Les études scientifiques ont montré que les bactéries du microbiote changent au cours du vieillissement d’un individu sous le contrôle de notre système immunitaire. Malheureusement, avec l’âge, il devient moins efficace et entraîne un déséquilibre de la composition du microbiote bactérien. Une personne jeune a une grande diversité de bactéries dont certaines souches sont sur-représentées, avec un effet bénéfique sur l’organisme. Parmi elles, des bactéries jouent un rôle immunomodulateur c’est-à-dire qu’elles réduisent les infections et les inflammations.
En vieillissant, cette diversité baisse et certaines bactéries positives pour le corps diminuent, voire disparaissent (figure 1). Les bactéries restantes d’une même souche ont alors tendance à rentrer en compétition pour occuper « l’espace disponible » et à muter pour créer une nouvelle souche bactérienne plus résistante. Cela conduit généralement à l’émergence de souches pathogènes contribuant au déclin de l’organisme vieillissant.

L’œuf ou la poule3 ?
Pendant la vie et lors du vieillissement, la composition du microbiote bactérien varie et s’adapte à la physiologie d’un individu ou à son style de vie. On pourrait donc se poser la question de « qui entraine quoi » ? Est-ce le vieillissement qui entraîne un déséquilibre bactérien ou est-ce le déséquilibre bactérien qui induit des dysfonctions dans l’organisme et donc le vieillissement ? Pour le moment, la question reste ouverte…
Les études scientifiques montrent que le microbiote exacerbe les changements biologiques qui surviennent au niveau des cellules et des tissus lors du vieillissement. En comprenant comment la population bactérienne évolue, on peut anticiper ces dysfonctionnements. Ainsi, à l’avenir, il devrait exister des traitements possédant un effet préventif ou curatif sur les déséquilibres du microbiote nocifs pour notre corps.
Bien dans son ventre, …
Pour être bien dans sa tête4,5

La maladie d’Alzheimer est une pathologie complexe car elle affecte plusieurs régions du cerveau. Pendant la vie, le cerveau peut être attaqué par des pathogènes endogènes et exogène (qui viennent de l’intérieur ou de l’extérieur, respectivement). Un système de défense patrouille dans le cerveau pour éliminer ces attaques et supprimer l’inflammation causée par l’infection. Dans la maladie d’Alzheimer, l’inflammation cérébrale (ou neuroinflammation) est chronique et participe de manière déterminante à la progression de la maladie.
Les données montrent que le déséquilibre du microbiote intestinal augmente le risque de développer une maladie d’Alzheimer. Pour faire simple, une composition anormale du microbiote intestinal induirait une inflammation chronique dans le corps. Celle-ci favoriserait la neuroinflammation et la neurodégénérescence cérébrale qui augmentent les risques de développer la maladie d’Alzheimer.
Des traitements curatifs pour rééquilibrer le microbiote ou préventifs pour empêcher son déséquilibre, pourront être crée à l’avenir. Actuellement, les travaux de recherche sont réalisés principalement chez des animaux de laboratoire. L’équilibre alimentaire et un mode de vie sain sont pour l’instant la meilleure façon chez l’Homme de prendre soin de son microbiote et de son cerveau.
Pour être bien dans ses os6,7
L’arthrose est une maladie commune liée au vieillissement qui entraîne des douleurs au niveau des articulations en raison de la détérioration des cartilages. Avec l’allongement de l’espérance de vie, de la sédentarité et des déséquilibres alimentaires, de plus en plus de personnes âgées souffrent d’arthrose. Un des facteurs de risque de cette maladie est l’inflammation. Elle contribue à son développement et à son aggravation.
Le microbiote intestinal change lors du vieillissement avec parfois une sur-représentation de bactéries qui contribuent à l’inflammation. Les femmes, à cause de la baisse des œstrogènes lors de la ménopause, y seraient plus sensibles. Chez des souris dépourvus d’œstrogènes, des expériences ont confirmé que la diminution de la diversité microbiote est associée à une perte osseuse.
Même si elles sont peu nombreuses, les études chez l’humain suggèrent qu’il existe un lien fort entre le microbiote intestinal et l’arthrose. Il reste à comprendre comment les bactéries du microbiote peuvent nous aider à réduire le risque d’arthrose ou à renforcer l’effet des médicaments anti-arthrosiques.
Conclusion

Notre microbiote le plus important se situe dans notre intestin que certains appellent notre « deuxième cerveau », et ce n’est surement pas par hasard. Tout porte à croire qu’il renferme de nombreux secrets et trésors de longévité. Les bactéries du microbiote aident le corps à assimiler des nutriments et à se défendre contre les agressions. Lors du vieillissement, l’équilibre bactérien change. Est-il responsable du déclin de l’organisme ou est-ce seulement une conséquence ? Les recherches continuent pour répondre à cette question et peut-être créer des médicaments pour garder nos bactéries à l’équilibre. En attendant, l’utilisation de prébiotiques (alimentation favorisant la santé du microbiote intestinale) ou de probiotiques (bactéries positives pour la santé) est une bonne manière de préserver sa flore intestinale et donc son organisme.
Bibliographie
- Microbiote intestinal (flore intestinale) ⋅ Inserm, La science pour la santé. Inserm https://www.inserm.fr/dossier/microbiote-intestinal-flore-intestinale/.
- Microbiote: des bactéries qui nous veulent du bien. CNRS Le journal https://lejournal.cnrs.fr/articles/microbiote-des-bacteries-qui-nous-veulent-du-bien.
- Aleman, F. D. D. & Valenzano, D. R. Microbiome evolution during host aging. PLoS Pathog. 15, e1007727 (2019).
- Cerovic, M., Forloni, G. & Balducci, C. Neuroinflammation and the Gut Microbiota: Possible Alternative Therapeutic Targets to Counteract Alzheimer’s Disease? Front. Aging Neurosci. 11, 284 (2019).
- Varesi, A. et al. The Potential Role of Gut Microbiota in Alzheimer’s Disease: From Diagnosis to Treatment. Nutrients 14, 668 (2022).
- Biver, E. et al. Gut microbiota and osteoarthritis management: An expert consensus of the European society for clinical and economic aspects of osteoporosis, osteoarthritis and musculoskeletal diseases (ESCEO). Ageing Res. Rev. 55, 100946 (2019).
- Doré, E. et al. The interaction of secreted phospholipase A2-IIA with the microbiota alters its lipidome and promotes inflammation. JCI Insight 7, (2022).
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