Points clefs :
- Les espèces réactives à l’oxygène sont produites naturellement par l’organisme et possèdent un effet bénéfique à faible dose, mais délétère à fortes doses.
- En vieillissant, l’inflammation contribue à déséquilibrer la balance des espèces réactives à l’oxygène, ce qui favorise le stress oxydatif à l’origine de nombreuses pathologies liées à l’âge.
- Rééquilibrer la balance est possible grâce à un mode de vie sain et une activité physique et permet de vivre plus longtemps en meilleure santé.
Vieillir est un processus naturel qui entraîne un déclin progressif du corps. Jeune, un organisme s’adapte aux changements de son environnement. Puis, avec les années, les conséquences des divers déséquilibres physiologiques deviennent irréversibles. Depuis plus de 50 ans, le stress oxydatif a été identifié comme un accélérateur d’altérations des cellules et donc du vieillissement du corps. Tous les organismes vivants y sont soumis, que ce soit une petite levure, un rat taupe nu ou un être humain1. La recherche commence à comprendre le fonctionnement de ce mécanisme et surtout, comment s’en protéger.
Quand un ERO devient malveillant…
Les cellules produisent naturellement des molécules appelées espèces réactives à l’oxygène, abrégées ERO en français ou également connues sous le terme anglais « ROS », pour reactive oxygene species. Elles sont principalement produites par les mitochondries mais peuvent également être la conséquence de facteurs extérieurs comme les rayons UV, la fumée du tabac ou les rayons X1.
En condition normale, un système de régulation cellulaire permet de conserver une concentration basse en ERO grâce à des composés dits anti-oxydants2. Dans ce cas, les ERO ont un effet positif sur la prolifération, la différenciation, la migration et la survie cellulaire. A cause du vieillissement ou d’un dérèglement de l’organisme, la quantité de ERO augmente et induit un stress oxydatif. Des composés hautement réactifs sont alors produits, ce qui entraine des dommages sur les protéines, les lipides et les glucides. Les plus connus sont les ALE (lipides oxydés) et les AGE (glucides oxydés). Ils altèrent les fonctions cellulaires, augmentent les dommages intra-cellulaires et finissent par tuer la cellule. Cela conduit à terme au vieillissement de l’organisme et/ou au développement de maladies chroniques liées à l’âge comme Alzheimer ou le diabète1.
Vivre sans RAGE serait-il la solution3 ?
Pour activer un mécanisme, il faut en général une clé et une serrure. Dans le cas du stress oxydatif, la molécule AGE (produit avancé de glycation) est une clé qui ouvre une serrure nommée RAGE pour « Récepteur de AGE ». L’association de AGE et RAGE démultiplie les effets du stress oxydatif en augmentant les réactions d’inflammation et d’oxydation délétères pour les cellules. RAGE est connu depuis longtemps pour être impliqué dans les mécanismes de l’immunité. Il permet d’activer la défense de l’organisme contre des agressions. En vieillissant, le nombre de récepteurs AGE augmente. Ce déséquilibre induit un cercle vicieux pro-vieillissement, abimant le corps.
Que se passerait-il si nous supprimions totalement RAGE des cellules ?
Des expériences de laboratoires ont montré que des souris dépourvus de RAGE se développaient normalement, avaient une fertilité normale, tout en réduisant les conséquences du stress oxydatif sur le système cardiovasculaire et neurologique. RAGE apparaît comme une cible intéressante pour réguler la physiologie de l’âge. Il est cependant important de connaître toutes les clés qui peuvent potentiellement interagir avec RAGE pour ne pas dérègler un autre mécanisme vital.
Ne sous-estimez pas « l’inflamm’aging »2,4–6 !

Chez la personne âgée, le stress oxydatif et l’inflammation augmentent le risque de vieillir dans de mauvaises conditions et semblent être une cause de vieillissement plus importante que l’âge en lui-même. Pour faire simple, ils entraînent une fragilité du corps. En particulier, l’inflammation n’est pas à sous-estimer puisqu’elle semble être une cause majeure de déclin physiologique. En anglais, un jeu de mot a ainsi été créé : « inflamm’aging » pour inflammation et vieillissement (aging).
Les études ont prouvé que le stress oxydatif et l’inflammation étaient associés aux maladies liées à l’âge c’est-à-dire le cancer, le diabète, l’insuffisance rénale, les maladies cardiovasculaires, les maladies neurodégénératives, l’insuffisance pulmonaire (BPCO) et la fragilité en général. Concrètement, l’augmentation du stress oxydatif induit une inflammation chronique au niveau cellulaire qui entraîne des défaillances génétiques, mitochondriales, protéiques… Les cellules ne sont plus en bonne santé et ne font qu’accélérer le déséquilibre oxydatif et inflammatoire. Différents organes tels que le cerveau, les reins, les muscles, le système cardiovasculaire et les poumons, sont altérés et participent à fragiliser et handicaper le corps (figure 1). Bien entendu, une vie saine, non sédentaire, avec une alimentation adaptée sont des facteurs protecteurs à ne pas sous-estimer.

Conclusion
Comme toujours, la santé est une question d’équilibre. A faible dose, les ERO sont positifs pour les cellules. A forte dose, elles deviennent nocives. Bien vivre et vieillir en bonne santé est une chance. Mais il est possible d’influencer positivement la balance en réduisant le stress oxydatif et l’inflammation. Un régime alimentaire sain et de l’activité physique sont déjà un bon début pour attendre les futures découvertes thérapeutiques de la science.
Bibliographie
- Moldogazieva, N. T., Mokhosoev, I. M., Mel’nikova, T. I., Porozov, Y. B. & Terentiev, A. A. Oxidative Stress and Advanced Lipoxidation and Glycation End Products (ALEs and AGEs) in Aging and Age-Related Diseases. Oxid. Med. Cell. Longev. 2019, 3085756 (2019).
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- Frimat, M., Teissier, T. & Boulanger, E. Is RAGE the receptor for inflammaging? Aging 11, 6620–6621 (2019).
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- Samson, L. D. et al. Inflammatory marker trajectories associated with frailty and ageing in a 20-year longitudinal study. Clin. Transl. Immunol. 11, e1374 (2022).
- B, C., R, H., Rw, K. & Jp, de R. V. The Role of Non-canonical and Canonical Inflammasomes in Inflammaging. Front. Mol. Neurosci. 15, (2022).
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