De nombreux scientifiques traquent les mystères de la durée de la vie au plus profond de notre ADN. Mais l’étude des gènes du vieillissement reste un champ de recherche complexe.
Disons-le d’emblée, au risque d’en décevoir quelques-uns : chez l’homme, aucun gène n’a pour unique rôle de réguler la longévité. Le gène, qui aurait le pouvoir magique de prolonger notre existence, n’existe donc pas.
« Par contre, il existe des variants de certains gènes qui favorisent une durée de vie plus importante, en réduisant le risque d’apparition des maladies liées à l’âge. Si vous avez de la chance à la loterie génétique, vous en bénéficiez. Si, au contraire, vous êtes moins chanceux, vous accumulez des variants des gènes qui contribuent à augmenter le développement des maladies cardiovasculaires ou de la maladie d’Alzheimer : des pathologies qui peuvent raccourcir l’espérance de vie », explique le Pr Bernard Sablonnière, médecin neurobiologiste, chef du département de biologie moléculaire à l’Université de Lille.

Ces mutations (ou Variants) qui allongent ou raccourcissent la vie
Une équipe internationale de chercheurs a examiné à la loupe une vingtaine d’études portant sur la génétique des populations, menées en Europe, aux États-Unis et en Australie, et portant au total sur quelque 600.000 personnes. Leurs résultats ont été publiés dans la revue Nature en 2017 : ils confirment, pour trois gènes, l’existence de variants associés à une longévité accrue.

L’un d’entre eux est le gène « APOE ».
Il doit son nom à la molécule apolipoprotéine E, responsable de la fabrication de protéines qui se combinent avec des graisses qu’elles transportent dans notre organisme.
« Il entraîne l’accumulation de cholestérol dans la paroi des vaisseaux sanguins, et augmente ainsi le risque de maladies cardiovasculaires. Dans le cerveau, il favorise les dépôts amyloïdes, caractéristiques de la maladie d’Alzheimer. Mais le gène « APOE » possède deux variants: le « variant E2 » protège de ces maladies, et le « variant E4 » en augmente le risque», précise le Pr Sablonnière.
Les centenaires, ces recordmans de la durée de vie
Le patrimoine génétique des centenaires est également passé au peigne fin. Mais les recherches menées ces dernières années n’ont pas permis de mettre en évidence de gènes miraculeux chez ces recordmans de la durée de vie.
« En revanche ils accumulent davantage de variants qui les protègent contre l’apparition des maladies liées à l’âge », souligne le Pr Sablonnière.
Les animaux de laboratoire sont aussi dans la ligne de mire des chercheurs : s’ils pouvaient nous rapprocher de cette fontaine de jouvence génétique ?
« Chez le petit ver Caenorhabditis elegans un gène, d’ailleurs baptisé « Age 1 », a été identifié : si vous le manipulez, vous diminuez la fertilité de ce ver mais vous augmentez de 70% sa longévité ! Un autre exemple chez la souris avec le gène « FOXO3 » : en le modifiant, on peut augmenter la durée de vie de cet animal d’environ 30% », relate le Pr Sablonnière.

Peut-on augmenter la longévité de l’homme en manipulant ses gènes ?
C’est le rêve caressé par le mouvement transhumaniste qui voit dans l’attribution du prix Nobel de chimie 2020 à E. Charpentier et J. Doudna pour la découverte des ciseaux moléculaires Crispr/Cas9 une avancée décisive.
Mais c’est un espoir encore lointain qui relève davantage du fantasme que de la science.
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